Encyclopédie volume 8 page 310 colonne gauche

Transposition par l'Horloger de la Croix-Rousse du volume 8 page 310 colonne de gauche de l'encyclopédie de Diderot et d'Alembert

…et différents Mémoires fort bien faits sur l’Horlogerie. De concert avec plusieurs habiles horlogers, nous avions formé le projet de rétablir cette espèce d’académie, et proposé à feu Mrs Julien le Roy, Thiout l’aîné, Romilly, et quelques autres horlogers célèbres. Tous auraient fort désiré qu’il réussît ; mais un d’eux me dit formellement qu’il ne voulait pas en être si un tel en était ; cette petitesse me fit concevoir la cause de la chute de la société des arts, et désespérer de la rétablir, à moins que le ministère ne favorisât cet établissement par des récompenses qui serviraient à dissiper ces basses jalousies.

On me permettra de parler ici de quelques-uns des avantages d’une société ou académie d’Horlogerie.

Quoique l’Horlogerie soit maintenant portée au très-grand point de perfection, sa position est cependant critique ; car si d’un côté elle est parvenue à un degré de perfection fort au-dessus de l’Horlogerie anglaise par le seul amour de quelques artistes, de l’autre elle est prête à retomber dans l’oubli. Le peu d’ordre que l’on peut observer pour ceux que l’on reçoit ; et plus que tout cela, le commerce qu’en font les marchands, des ouvriers sans droit ni talents, des domestiques et autres gens intrigants, qui trompent le public avec de faux noms, ce qui avilit cet art : toutes ces choses ôtent insensiblement la confiance que l’on avait aux artistes célèbres, lesquels enfin découragés et entraînés par le torrent, seront obligés de faire comme les autres, cesser d’être artistes pour devenir marchands. L’Horlogerie dans son origine en France paraissait un objet trop faible pour mériter l’attention du gouvernement, on ne prévoyait pas encore que cela pût former dans la suite une branche de commerce aussi considérable qu’elle l’est devenue de nos jours ; de sorte qu’il n’est pas étonnant qu’elle ait été abandonnée à elle-même ; mais aujourd’hui elle est absolument différente, elle a acquis un très-grand degré de perfection : nous possédons au plus haut degré l’art d’orner avec goût nos boîtes de pendules et de montres, dont la décoration est fort au-dessus de celle des étrangers qui veulent nous imiter : il ne faut donc plus envisager l’Horlogerie comme un art seulement utile pour nous-mêmes : il faut de plus le considérer relativement au commerce qu’on en peut faire avec l’étranger.

C’est de l’établissement d’une telle société que l’art de l’Horlogerie acquerra le plus de confiance de l’étranger.

Car 1°. Une telle académie servirait à porter l’Horlogerie au plus haut point de perfection par l’émulation qu’elle exciterait parmi les artistes, ce qui est certain, puisque les arts ne se perfectionnent que par le concours de plusieurs personnes qui traitent le même objet.

2°. Les registres de cette société serviraient comme d’archives, où les artistes iraient déposer ce qu’ils auraient imaginé ; les membres de ce corps plus éclairés et plus intéressés à ce qu’il ne se commît aucune injustice, empêcheraient les vols qui se font tous les jours impunément : sur les mémoires que l’on rassemblerait, on parviendrait à la longue à publier un traité d’Horlogerie très-différent de ceux que nous avons ; c’est faute de pareilles archives que l’on voit renaître avec succès tant de constructions proscrites, et c’est ce qui continuera d’arriver toutes les fois que l’on approuvera indifféremment toutes sortes de machines nouvelles ou non.

Or le public imagine que l’art se perfectionne ...